Le Capitaine Climat Daniel Lüscher: «La durabilité est un sport d’équipe.»

«En tant que pilote, tu dois prendre des décisions et assumer des responsabilités», explique Daniel Lüscher. «J’ai donc décidé de ne pas m’enfoncer plus profondément dans cette tempête, mais de faire une escale.» Ce qui ressemble à une anecdote spectaculaire dans la bouche d’un pilote professionnel de longue date est à la fois une métaphore et une réalité. D’une part, l’œil du cyclone est rarement une destination confortable, que l’on soit à bord d’un avion ou non. D’autre part, les tempêtes violentes, qui sont des phénomènes météorologiques extrêmes de plus en plus fréquents, font généralement partie des caractéristiques du changement climatique. Il est prouvé que les fortes pluies persistantes, la grêle, la chaleur ainsi que la sécheresse font également partie des conséquences du réchauffement climatique. «Nous devons rétablir notre relation à la nature», explique Daniel Lüscher en montrant l’exemple. Lui qui a passé un quart de siècle au service de l’aviation a complètement arrêté de prendre l’avion à titre personnel. Au lieu de porter une casquette de capitaine, il arbore désormais le chapeau de la durabilité. «Nous pouvons tous contribuer à améliorer l’environnement, même en agissant à petite échelle dans notre vie privée.»

Où est passée toute la neige?

Canton d’Appenzell Rhodes-Extérieures dans les années 1970: Daniel Lüscher grandit à Speicher, une commune des Préalpes située à environ 900 mètres d’altitude. «Que ce soit en faisant de la luge ou du ski, c’est dans la neige que j’ai vécu mes moments les plus heureux.» À l’époque, les pentes du village restaient blanches pendant quatre mois. «Aujourd’hui, on n’a plus que cinq jours de ski par an. Cela fait longtemps que le téléski local de Vögelinsegg n’est plus rentable.» Des changements hivernaux radicaux, sur lesquels un instructeur de vol a également attiré son attention dans les années 1990. «Il m’a dit que je devais regarder davantage dehors lors des vols et profiter de la neige, qu’il y en avait de moins en moins.» Des paroles ont profondément marqué le jeune homme. Et dans un métier offrant une telle perspective, Daniel Lüscher s’est progressivement rendu compte qu’il se passait des choses dans la nature qui donnaient à réfléchir. «Malgré cela, je n’ai rien fait dans un premier temps.» Ce n’est qu’au début du nouveau millénaire, en 2007 plus précisément, qu’il a commencé à militer.

Le moment clé: un documentaire culte

C’est un film qui a convaincu Daniel Lüscher de faire partie de la solution et non du problème: «An Inconvenient Truth» (en français «Une vérité qui dérange»), le documentaire d’Al Gore récompensé aux Oscars. L’ancien vice-président américain a ainsi tenté d’alerter le monde sur la question du réchauffement climatique. «J’ai vu le film lors d’un séjour à New York», se souvient Daniel Lüscher. «Après ça, j’ai su qu’il était temps d’agir – y compris pour moi.» Ce fut le coup d’envoi de Myblueplanet. L’association s’adresse aux personnes qui souhaitent contribuer à la protection du climat au cours de leur vie. «Nous montrons à petite échelle ce qui est réalisable à grande échelle», explique Daniel Lüscher, en citant le slogan de l’association. De retour de New York, il réunit des fonds avec l’aide de ses ami·e·s et de son entourage pour projeter gratuitement le film d’Al Gore dans les cinémas de Winterthour pendant toute une semaine. Plus de 15 000 personnes profitent de cette opportunité – un premier succès pour la petite équipe de l’époque.

La durabilité avec la tête, le cœur et les mains

Désormais, le «personnel au sol» de Daniel Lüscher compte 15 personnes qui travaillent dans les bureaux de Myblueplanet à Winterthour. Lui-même se consacre depuis plus d’un an à plein temps à la protection du climat – d’ailleurs, il va bientôt passer son master. «J’ai terminé une partie de mon ‹Executive MBA in Sustainable Business›. Mon mémoire de master porte sur les ‹Climate actions for companies›.» Il s’agit de stratégies pour les PME suisses qui permettront d’atteindre le zéro net, la neutralité climatique. Parallèlement, tous les projets que l’association met en œuvre avec succès depuis des années se poursuivent. En voici une sélection: programmes climatiques avec des écoles et des communes dans la moitié de la Suisse, ateliers de formation pour les apprenti·e·s et projets visant à doubler la surface photovoltaïque dans le canton de Zurich. Il y a une chose à laquelle Daniel Lüscher attache une importance particulière. «La nature est notre partenaire. Et nous devons la traiter comme telle.» Pour lui, être actif de manière durable signifie aussi s’engager pleinement avec sa tête, son cœur et ses mains. «Avec les personnes qui participent au projet MyBlueTree, nous avons planté plus de cinq mille arbres au cours des dernières années.»

L’être humain au premier plan

Daniel Lüscher a décidé de consacrer les dix dernières années de sa vie professionnelle à la protection du climat. Il a abandonné l’aviation, sa grande passion, qui le fascinait déjà lorsqu’il était enfant dans les Préalpes appenzelloises. Lui, qui a plus de 10 000 heures de vol derrière lui. «En ce qui concerne l’aviation, il faut d’urgence une taxe sur le CO₂ pour tous les carburants», dit-il. Daniel Lüscher n’est pas du genre à vouloir améliorer la situation climatique uniquement par des interdictions et des réglementations. «Je souhaite que les gens réfléchissent eux-mêmes à ce qui est utile et à ce qui ne l’est pas.» Un exemple? «Privilégier le train plutôt que la voiture – ou acheter local.» Daniel Lüscher est convaincu que même les petits pas conduisent vers un avenir plus durable. Et il y a encore d’autres facteurs qui rendent le Capitaine Climat confiant. «La pression de l’opinion publique sur les entreprises qui portent atteinte au climat ne cesse de croître. En outre, la protection du climat devient peu à peu un big business, il faut trouver des solutions innovantes – nous devons redevenir des pionniers·ères.»

La situation climatique mondiale ne dépend pas seulement des nouvelles technologies; elle dépend aussi de notre comportement en tant qu’êtres humains. Sur ce point également, Daniel Lüscher est convaincu que les choses vont évoluer dans le bon sens à l’avenir. «Dans quelques années, des jeunes engagés en faveur du climat occuperont des postes décisifs dans les domaines politiques et économiques», dit-il. «C’est une nouvelle génération qui est parfaitement sensibilisée à la durabilité et qui a conscience qu’il ne s’agit pas uniquement de richesse et de prospérité.» Ce sont donc les rencontres avec de nombreuses personnes différentes que Daniel Lüscher a choisies comme point fort de ses années passées en tant que défenseur du climat. «Jusqu’à présent, nous avons réussi à inspirer positivement de nombreuses personnes. Nous comptons également 150 bénévoles qui mettent leurs connaissances et leur temps à notre service et qui participent bénévolement à nos projets.» Atteindre un objectif commun est à la fois une grande motivation et un objectif pour Daniel Lüscher. En effet, s’il y a bien une chose dont il est sûr, c’est que: «Le développement durable est un sport d’équipe – on a besoin de tout le monde.»