«Les centres de données sont plus efficaces que les petites salles de serveurs»

M. Campomilla, les nouveaux centres de données de Green sont en construction à Dielsdorf. Quel est l’avenir du secteur?

Les centres de données sont la colonne vertébrale de la numérisation. A l’avenir, les moyens de transport communiqueront entre eux de manière fluide et échangeront des données afin d’améliorer la sécurité de la conduite et d’éviter les embouteillages. Des progrès seront également réalisés dans le domaine des technologies médicales et de la santé. Et dans celui de l’intelligence artificielle, cela va de soi. La numérisation va s’intensifier à l’extrême et le volume de données va donc considérablement augmenter. C’est pourquoi les fournisseurs de centres de données bien établis comme Green augmentent rapidement leurs capacités.

L’emplacement d’un centre de données doit répondre à des exigences élevées. Quels étaient les critères pour Dielsdorf?

La sécurité est un facteur central. Sur nos sites, nous effectuons des contrôles pour évaluer différents risques, tels que les tremblements de terre, les inondations ou les accidents. De plus, les distances par rapport à nos autres sites doivent être convenables. C’est-à-dire à la fois permettre une transmission rapide des données et assurer un éloignement suffisant pour des raisons de sécurité. Le bon niveau de raccordement, comme l’accès aux transports publics et au réseau de fibre optique, a joué en faveur de Dielsdorf. Mais l’approvisionnement en énergie est également décisif.

Y a-t-il de grandes différences en Suisse?

Notre clientèle exige un raccordement électrique doublement indépendant. A Dielsdorf, cela est garanti par la sous-station d’EKZ située directement sur le campus et par les sous-stations de Steinmaur et de Regensdorf.

Les centres de données sont souvent considérés comme très gourmands en énergie. Le nom de l’entreprise Green, quant à lui, est associé à la durabilité. Quel est le rapport?

Ce sont les systèmes client qui ont besoin d’énergie, à savoir environ 70 à 80% de la consommation totale d’énergie d’un centre de données moderne. Mais en réalité, nous sommes tous responsables de cette forte consommation d’énergie. Nous stockons des données dans le cloud, regardons des films en streaming et organisons des visioconférences. Les entreprises dépendent de la disponibilité sans faille de leurs systèmes informatiques, car la numérisation englobe toute l’économie. Pour simplifier, les centres de données sont des bâtiments de haute sécurité, mais ils sont beaucoup plus efficaces que les petites salles de serveurs des entreprises. Pour notre infrastructure, nous utilisons de l’électricité d’origine hydraulique, éolienne et solaire. De manière générale, nous n’avons besoin que de peu d’énergie, par exemple pour les installations de sécurité et les pompes de circulation.

Et comment refroidissez-vous?

Avec le free cooling, nous utilisons l’air extérieur pour refroidir les halls de données. Cela fonctionne jusqu’à une température extérieure de 18 ºC. Ensuite, nous refroidissons en mode hybride, qui nécessite l’énergie d’un système de refroidissement en plus de l’air extérieur. Ce n’est que lorsqu’il fait 30 ºC à l’extérieur que les systèmes de refroidissement fonctionnent à plein régime.

Est-ce que cela correspond à la norme actuelle dans les centres de données?

Pour nous, chez Green, c’est le cas. Nos centres de données offrent une efficacité énergétique élevée et font l’objet d’un développement continu. Outre l’architecture Minergie, la façade perméable à l’air assure une circulation importante de l’air à l’intérieur du bâtiment. Par ailleurs, des couloirs froids autour des racks informatiques permettent un refroidissement ciblé des systèmes. De plus, nous ajustons nos installations en permanence.

L’exploitation des appareils techniques dans un centre de données génère beaucoup de chaleur résiduelle. Celle-ci doit être extraite à Dielsdorf et utilisée pour un réseau de chauffage. A quoi faut-il veiller?

D’une part, l’utilisation de la chaleur résiduelle a des conséquences sur la construction. L’air froid et l’air chaud ne doivent pas se mélanger dans le bâtiment. C’est l’une des conditions de base pour extraire la chaleur résiduelle efficacement. D’autre part, un centre de données produit de la chaleur résiduelle toute l’année. L’idéal est donc d’avoir suffisamment de consommateurs·trices de chaleur résiduelle dans les environs non seulement en hiver mais aussi en été. Il peut s’agir, par exemple, de serres agricoles ou d’industries qui ont besoin de chaleur industrielle.

Est-il possible d’utiliser après coup la chaleur résiduelle de centres de données existants?

Il est difficile d’ajouter un équipement ultérieur en partant de zéro. Les centres de données sont conçus pour fonctionner 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 et leur exploitation ne pourrait alors pas être maintenue.

Que faut-il changer pour que la chaleur résiduelle des centres de données soit davantage utilisée à l’avenir?

Il faut des acheteurs·euses. La proximité d’agglomérations est donc un critère supplémentaire pour le choix de l’emplacement de nouveaux centres de données. Et il faut des exploitants de réseaux de chauffage à distance prêts à investir dans le réseau. A Dielsdorf, nous avons eu une excellente collaboration avec la commune et Energie 360°.

Quelles innovations technologiques rendraient l’utilisation de la chaleur résiduelle plus efficace et plus simple?

Je travaille actuellement sur une idée prometteuse. Mais je n’en dirai pas plus tant qu’elle n’aura pas été testée et brevetée. Le refroidissement à l’eau fait lentement son apparition. Contrairement au refroidissement à l’air actuel, aucun transfert de chaleur n’est nécessaire pour extraire la chaleur résiduelle. Cela le rend particulièrement efficace. Une autre possibilité serait d’augmenter la température de l’air, ce qui permettrait de chauffer davantage l’eau utilisée pour le réseau de chauffage. De notre point de vue, les systèmes client pourraient également fonctionner en toute sécurité à 30 ºC, mais pour l’instant, les fabricants de matériel ne le garantissent pas.

On entend souvent dire que l’utilisation de la chaleur résiduelle profite avant tout à la collectivité car elle permet d’économiser de l’énergie et de réduire les émissions de CO₂. Les exploitants de centres de données, quant à eux, n’auraient que des coûts à supporter. Dans le cas de Dielsdorf, quelle part des coûts totaux a été consacrée à la valorisation de la chaleur résiduelle?

Les coûts sont en tout cas élevés, plus élevés que sans extraction de chaleur. Green s’efforce toutefois d’investir dans des technologies respectueuses de l’environnement et de contribuer à l’économie circulaire. Une chose était donc claire pour nous: nous voulions mettre à disposition la chaleur résiduelle lors de la construction d’un nouveau centre de données.

Que fait Green pour améliorer encore davantage la durabilité et l’efficacité énergétique de ses centres de données?

Le plus grand levier consiste à conseiller et sensibiliser la clientèle et à développer de nouvelles approches avec les fournisseurs et les partenaires. Et comme je l’ai déjà dit, nous travaillons aussi en coulisse sur des innovations technologiques.