Stabl Energy: un game changer pour la transition énergétique

«Tout changement commence par de petites choses», déclare Markus Förstl, Head of Business Development de la start-up munichoise Stabl Energy. Les créateurs de Stabl Energy qualifient leur technologie de «clé pour la transition énergétique». Ce sont des onduleurs modulaires multiniveaux ou MMC (en anglais modular multilevel converter). Il s’agit de systèmes de stockage stationnaire par batterie, comme ceux utilisés par exemple pour les installations solaires ou éoliennes. Comparés aux onduleurs centraux, qui représentent aujourd’hui le statu quo en matière de systèmes de stockage d’électricité, les MMC offrent plusieurs avantages majeurs.

Meilleure efficacité énergétique et coûts d’exploitation réduits

Il convient avant tout de souligner l’efficacité énergétique des MMC. Une réduction de 70% des pertes d’énergie et, dans le même temps, une diminution de 40% des coûts d’exploitation pour un coût d’investissement presque identique. C’est la promesse que la start-up Stabl Energy, fondée en 2019, fait à sa clientèle. «En Allemagne et en Europe, nous souhaitons abandonner le charbon, le gaz et les autres combustibles fossiles au profit des énergies renouvelables. Or, le soleil ne brille pas en permanence et le vent ne souffle pas non plus 24 heures sur 24», explique Markus Förstl. D’où la nécessité de stocker l’énergie pour alimenter la charge énergétique de base.

Ces défis existent bien entendu aussi en Suisse. Les aides publiques telles que la rétribution du courant injecté ont été et sont de plus en plus réduites, si bien que l’injection d’électricité excédentaire dans le réseau n’est plus rentable. La solution consiste à stocker l’énergie produite pour l’utiliser soi-même, plutôt que de vendre l’énergie restante à bas prix puis de la racheter à un prix élevé lorsqu’on en a besoin. En effet, même si la Suisse a enregistré un nombre d’heures d’ensoleillement supérieur à la moyenne l’année passée, il arrive un moment où le soleil se couche.

Si l’on se réfère aux statistiques récentes, on constate que les jeunes entrepreneurs de Stabl Energy ont su toucher une corde sensible avec leur technologie. En Suisse, la part de la production d’électricité solaire dans la consommation d’électricité est désormais d’environ six pour cent. Selon l’Office fédéral de l’énergie, le photovoltaïque n’est pas le seul secteur à avoir battu un nouveau record en 2021 avec 43% de croissance par rapport à l’année précédente. Le stockage d’électricité devient également de plus en plus populaire en Suisse. Le nombre de nouveaux stockages sur batterie installés a été multiplié par 2,5 par rapport à l’année précédente. Sur les maisons individuelles, environ une installation photovoltaïque sur trois dispose désormais d’un accumulateur de ce type. Mais, seule une minorité de ces stockages sur batterie sont vraiment rentables, explique Markus Förstl. «En général, les particuliers se tournent vers des installations solaires pour des raisons d’idéal. L’objectif est d’être durable et indépendant. C’est certainement aussi la motivation première de nombreuses entreprises, mais au final, il faut que cela soit rentable financièrement», poursuit Markus Förstl. Grâce à Stabl Energy, le stockage d’électricité sera à l’avenir non seulement plus économique, mais aussi plus sûr en raison de la tension de service relativement basse.

Une seconde vie pour les batteries des voitures

La durabilité est un autre aspect auquel Stabl Energy s’intéresse. Les voitures électriques connaissent actuellement un véritable boom. Malgré une baisse record des immatriculations de véhicules ces dernières années, due au coronavirus et à la crise, le nombre de nouvelles voitures électriques immatriculées en 2022 a augmenté de plus de 25% par rapport à l’année précédente. La part de marché des voitures électriques en Suisse s’élève ainsi à 17,8%, contre 13,3% l’année précédente. La batterie au lithium reste néanmoins le point faible des voitures électriques. Sa performance diminue au fil du temps. Le recyclage des batteries n’étant pas rentable, la voiture entière est généralement mise au rebut. Et ce, même si les batteries au lithium actuelles fournissent encore environ 80% de leur puissance initiale. Cela n’est pas très positif pour l’empreinte écologique des e-véhicules. «Se débarrasser de la batterie d’une voiture avant qu’elle ne soit en fin de vie, c’est un peu comme jeter un pot de Nutella à la poubelle alors qu’on vient à peine de faire trois tartines avec», estiment les dirigeants de Stabl Energy.

Jusqu’à présent, le concept de seconde vie, c’est-à-dire l’approche consistant à donner une deuxième vie aux batteries automobiles, n’était pas économiquement viable, car le traitement nécessitait trop de travail et était trop coûteux. Lorsque plusieurs batteries sont connectées en série, les batteries les moins puissantes ont un effet négatif sur la puissance totale. Si une cellule tombe en panne, c’est tout le bloc de batteries qui s’arrête. En d’autres termes, une chaîne est aussi puissante que son maillon le plus faible. La performance d’un stockage sur batterie dépend de celle de son composant le plus faible. Chez Stabl Energy, les différents modules sont connectés de manière dynamique et non statique, ce qui permet d’équilibrer et de compenser les différentes capacités de puissance. Dans ce contexte, l’onduleur modulaire multiniveaux développé par Stabl Energy agit comme un muscle qui charge et décharge la batterie et la connecte au réseau électrique. Les réparations coûteuses et compliquées sont réduites, ce qui constitue un avantage considérable, notamment au vu de la pénurie de personnel qualifié.

Jusqu’à présent, les constructeurs automobiles eux-mêmes mettent encore des bâtons dans les roues au concept de seconde vie. Pour les constructeurs automobiles comme Tesla et Volkswagen, la batterie n’est pas un composant interchangeable, mais un élément structurel du véhicule, solidement intégré au reste de la voiture. La situation est plus favorable pour les véhicules utilitaires, qui reçoivent une nouvelle batterie deux à trois fois au cours de leur cycle de vie, dès lors que l’ancienne devient moins performante. Mais là encore, les défis sont nombreux. «Il est très difficile de localiser les retours. L’UE travaille actuellement sur un concept de passeport pour les batteries. Cela devrait permettre à l’avenir de savoir où se trouvent les batteries installées, afin, espérons-le, de pouvoir les retirer plus facilement des véhicules et de les réutiliser», déclare Markus Förstl. Stabl Energy mise donc pour l’instant sur les constructeurs de batteries. «Nous vendons notre technologie directement aux fabricants. Ils fabriquent ensuite par exemple le boîtier et intègrent nos composants – des accumulateurs équipés de Stabl Energy inside», explique Markus Förstl.

Il faut du courage pour suivre sa propre voie

Le fonds Smart Energy pour l’innovation d’Energie 360° accompagne et soutient la start-up munichoise depuis ses débuts. Le premier contact a été établi avant la création de l’entreprise, lorsque l’équipe a remporté la deuxième place de l’IDEAward décerné par l’université technique de Munich. Cela a donné naissance à un partenariat fiable. Selon Energie 360°, le système d’onduleurs de Stabl Energy pourrait transformer le marché du stockage sur batterie et accélérer ainsi la transition énergétique. «Grâce à la technologie de Stabl Energy, le stockage sur batterie devient également financièrement intéressant pour de nombreuses applications. C’est surtout la flexibilité et la combinaison de différents modules de batteries au sein d’un même système de stockage – ainsi que la facilité de réutilisation des batteries de seconde vie – qui rendent ce concept extrêmement intéressant», souligne Metin Zerman, Investment Manager du fonds Smart Energy pour l’innovation d’Energie 360°. Le fonds Smart Energy pour l’innovation soutient les start-up qui contribuent à un avenir énergétique durable et connecté de manière intelligente.

Le financement est un véritable défi pour les start-up spécialisées dans les solutions matérielles, car elles ont besoin de davantage de capital et évoluent plus lentement que les entreprises classiques qui développent des solutions logicielles. Le cofondateur de Stabl Energy Nam Truong ne peut donc que conseiller aux autres créateurs·trices d’entreprise de prendre leur courage à deux mains, de s’en tenir à leurs décisions malgré les incertitudes et de mener à bien leurs propres stratégies de manière ciblée. Il a également appris certaines choses sur le tas. «On n’explique jamais assez simplement sa propre technologie. Même si, en tant que technicien·ne ou expert·e, on aime bien entrer dans les détails ingénieux, il faut d’abord expliquer les grandes lignes», souligne Nam Truong.

Après avoir obtenu la certification avec succès, Stabl Energy prévoit d’entrer sur le marché dès cette année, comme le rappelle Markus Förstl: «Nous sommes fiers d’avoir réussi à satisfaire aux exigences sévères des certifications de la zone DACH et d’être désormais prêts à commencer la production en série de nos accumulateurs de seconde vie. Nous sommes impatients d’améliorer l’efficacité énergétique des entreprises et des industries, et de construire un avenir plus durable.»